Portrait d’un soldat guyanais aux USA

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Victoria Will est née à Strasbourg en France. A l’âge de 3 ans, Elle rentre en Guyane sur la terre natale de ses parents et fait toute ma scolarité à l’Externat St Joseph.

Nous vous invitons aujourd’hui à découvrir son univers. Victoria travaille dans l’armée américaine mais n’oublie pas ses origines.

 

Fier d’être Guyanais (F.E.G.) : Alors comme ça, vous êtes à l’armée aux Etats-Unis… Qu’est-ce qui vous a fait arriver jusque là ?

Victoria Will (V.W.) : Tout d’abord quand j’y réfléchis, je pense que l’armée, pour moi, était plus qu’une vocation. Je me rends compte que j’ai toujours été intéressée par l’armée. Enfant, je jouais tout le temps avec les uniformes militaires de mes oncles et cousins. D’ailleurs en 2006, c’est avec fierté que je suis devenue militaire de Gendarmerie.

 

F.E.G. : Vous êtes où aux Etats-Unis ?

V.W. : Je suis basée à Fort Hood au Texas, qui est une des plus grandes installations militaires des Etats Unis, avec une population d’environ 53000 habitants dont 45000 soldats. Mon unité est la 2ème Brigade de la division de1ère cavalerie, l’une des divisions de combat la plus décorée.

 

F.E.G. : Quel est votre poste et votre grade ?

V.W. : Mon grade est celui de « Spécialist » qui pourrait être équivalent au grade de Caporal Chef dans l’armée de terre Française. J’occupe le poste de « Supply Spécialist ». Je fais de la logistique pour un escadron composé de 5 compagnies comprenant environ 600 soldats.

 

F.E.G. : C’était un rêve ou vous y êtes par hasard ?

V.W. : Non, ce n’était pas un rêve car être dans l’armée n’est pas un métier de rêve. Je pense que c’était plutôt une vocation. Comme je le disais précédemment, depuis petite j’étais attirée par l’uniforme. Après 2 ans passés dans les forces de Gendarmerie en 2008, j’ai quitté la France pour reprendre des études à New York, aux Etats Unis. Près de mon université, il y avait un bureau de recrutement. Et tous les jours les militaires venaient parler aux étudiants et faisaient de la publicité en ventant les mérites de l’armée. Après avoir résisté pendant 5 ans à leurs invitations, j’ai finalement décidé d’aller dans leur bureau et voir ce qu’ils proposaient. Deux heures après, je ressortais avec un contrat signé pour 5 ans. Et 6 mois plus tard, je prenais l’avion en direction du “Boot Camp” (Camp d’entrainement militaire) à Fort Jackson en Caroline du Sud.

 

F.E.G. : Comment se passe l’intégration d’une Guyanaise dans l’armée Américaine? Est-ce qu’ils vous ont bien accueilli? Parce qu’en plus d’être une étrangère pour eux, vous êtes une femme?

V.W. : Mon intégration dans l’armée s’est très bien passée. Ça a été facile du fait que les Américains recrutent énormément. Donc, vraiment, il n’y a eu aucune complication. Au niveau de l’accueil, c’était bien sûr un accueil très militaire, surtout à mon arrivée au « Boot Camp ». Et puis il est connu qu’à l’armée on ne pose pas de question. Du moment que l’on fait preuve de discipline, il n’y a pas de problème. Le fait d’être étrangère ne m’a apporté aucun souci car dans l’armée Américaine, il y a beaucoup d’étrangers et de toutes nationalités. J’ai par ailleurs trouvé surprenant le nombre de francophones dans cette armée. Etre une femme dans l’armée est très apprécié par la population Américaine. A la base ils sont fiers de leurs soldats et leur sont reconnaissant. De plus en plus la gente féminine prend de l’ampleur dans l’armée et depuis l’année dernière le Département de la Défense autorise les femmes dans 95% des postes de combat. C’est une belle victoire !

 

F.E.G. : Est-ce que vous conseilleriez de faire la même carrière que vous?

V.W. : Je ne le conseillerais qu’à ceux qui veulent vraiment se lancer dans cette carrière car, être militaire n’est pas un métier facile. Cela demande beaucoup de sacrifices et de discipline. On ne fait pas et on ne dit pas ce que l’on veut dans l’armée. Pensez que votre corps ne vous appartient plus. Il appartient au gouvernement qui a le droit de vous envoyez en mission n’importe où dans le monde sans que vous ayez le choix. Peu importe que vous ayez une famille qui dépend ou pas de vous. Il faut aussi penser que, malheureusement, vous risquez tous les jours votre vie lors des missions.

 

F.E.G. : Vos parents vous ont-ils toujours soutenu dans ce choix ?

V.W. : Je dirai que mon père m’a supporté dans mon choix dès le début. Ma mère n’était pas trop d’accord mais a respecté ma décision. Ma grand mère quant à elle, m’a demandée si je n’étais pas tombée sur la tête…mdr… mais a fini par accepter.

 

F.E.G. : Pourquoi ne pas avoir fait votre carrière en Guyane?

V.W. : Honnêtement, je vous dirai que je n’ai jamais voulu quitter mon pays; mais apparemment la vie en a décidé autrement. Après le bac, je suis partie en France pour étudier comme le faisait la majorité des étudiants de mon époque.

 

F.E.G. : Racontez nous un moment marquant de votre carrière ?

V.W. : En juin 2015, sur ordre de l’Otan, notre brigade qui compte environ 5000 soldats a été envoyée en Corée du Sud pour 9 mois dans le but de soutenir leurs forces armées. Pour info, officiellement, la Corée du Nord et la Corée du Sud sont toujours en guerre depuis 1950. Il existe un cessez-le-feu qui date de 1953. Nous étions basés à Camp Casey, situé dans le nord de la Corée du Sud, à 50 km de la frontière avec la Corée du Nord. Au mois d’août 2015 ont commencé de grosses tensions entre les 2 pays. Nos troupes, de ce fait, ont été directement alertées et mises en position de combat. A ce moment là, je me rappelle être au volant de mon véhicule militaire (un Hmmwv), conduisant en direction de la frontière avec une peur terrible au ventre. J’étais vraiment inquiète et je me demandais ce que j’allais dire à ma mère. Comment allais-je lui expliquer que son seul et unique enfant partait au front et qu’il y avait possibilité de guerre?….Je ne souhaite à personne de passer par là. Des mois après, quand j’y repense, j’ai toujours ces maux de ventre qui reviennent.

 

F.E.G. : Vos projets pour 2016 ?

V.W. : Mon plus gros projet est de venir restaurer mon corps et mon âme en Guyane pour les vacances. Sinon, j’ai quelques projets pour 2016 mais l’armée m’occupe tellement que je suis dans l’obligation de les laisser en stand by.

 

F.E.G. : Qu’est-ce qui vous manque le plus en Guyane?

V.W. : Je ne sais pas si j’arriverai à tout citer. Mais, bien sûr, ma famille me manque. Sinon, l’atmosphère en général de mon pays me manque. Imaginez ce que quelqu’un qui sort de prison après 10 ans peu ressentir… Et bien c’est exactement ce que je ressens à chaque fois que je rentre au Pays. Ce sont des choses simples qui me manquent, comme parler le créole, bien que mes voisins de la Louisiane parlent un créole similaire mais ce n’est pas mon créole. Le réveil au chant des Kikiwis chez ma grand -mère. Entendre la voix de Tonton JO le matin sur RFO, aller chanter et jouer un Kassé Kô du coté de Macouria, courir le vidé du matin lors des périodes carnavalesques et tant d’autres. Et surtout, la nourriture me manque car en Guyane, nous avons une nourriture tellement naturelle et bio comparée à celle d’ici (usa). Et aussi, le savoir vivre Guyanais, qui n’existe pas ailleurs. En Guyane, nous sommes de bons vivants, on s’est vivre, on est relax. Voila, ce sont des choses simples mais qui valent de l’or!

Les américains disent God bless America, alors moi je dis: Que Dieu bénisse la Guyane !

 

– Fier d’être Guyanais et vous ?!

Ecrit par : Anjie Say

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