Que ce soit en famille ou avec les camarades, le bouillon d’awara est le plat traditionnel guyanais par excellence en cette période de Pâques.
Moi, je ne vais pas vous mentir, en ce lundi férié, je suis au 2ème round avec les bladas.
Dimanche c’était avec la famille et depuis vendredi soir, on a commencé la préparation.
On a mis la pâte sur le feu … à feu très doux …
En effet, comme c’était de la pâte congelée, on a dû ajouter de l’eau pour que cela redevienne liquide. Eh bien, il faut faire évaporer cette eau indésirable.
Le samedi matin, on est passé à la découpe des légumes.
Alors petite précision qui a toute son importance : on est en France !! Alors on a fait un bouillon d’awara français. Soyez indulgent, nous avons fait avec les moyens du bord c’est-à-dire pas de concombre longe et pas de concombre piquant qui ont été remplacé par des choux. Les épinards, les haricots verts et les aubergines ont bien sûr été de la partie.
On a commencé par les salaisons : groins et queues de cochon et lard …
Puis on a ajouté les haricots verts et les épinards … suivis par les aubergines …
Comme la viande et/ou le poisson est déjà cuite, on l’ajoute en dernier.
Nous, on a pris le parti de mettre les crustacés à part pour ne pas gêner ce qui n’en mangeait pas.
C’est une pratique plutôt courante aujourd’hui, mais avant on ne se posait pas trop la question et on mélangeait le crabe et les crevettes avec le reste.
Je me suis amusée à faire ma master chef …
J’ai donc l’honneur de vous présenter mon bouillon d’awara gastronomique version Métropole :
Et en bonus, je vous propose même d’écouter le chant de fin de cuisson :
Le saviez-vous ?LA LEGENDE DU BOUILLON D’AWARA
Il y a très longtemps de cela, quand la Guyane n’était peuplée que d’amérindiens, arriva dans le pays un homme blanc, envoyé par la France pour faire des recherches en forêt.
Il partit seul à bord d’un canot, marcha à l’intérieur du pays et au bout de plusieurs semaines arriva au mont Tumuc Humac.
Là bas, il ne rencontra personne qui puisse l’aider, il s’était perdu et la nuit, les ombres et les bruits de la forêt l’effrayaient. Ce jour là, épuisé, il s’assit au pied d’un fromager, fit un feu de bois et mangea quelques fruits qu’il avait récoltés durant la journée.
Tout à coup, le silence se fit autour de lui, tous les animaux de la nuit semblaient avoir disparu. Un danger menaçait ! Il n’eut pas le temps de se lever, qu’un groupe d’amérindiens l’entourait, le menaçant de leurs flèches. Il crut sa mort arrivée quand une belle jeune fille s’avança et dit à ses compagnons : « Non, ne le tuez pas, vous ne savez pas qui il est, c’est peut-être un bon esprit ! »
C’était la première fois qu’ils voyaient un homme blanc. Les amérindiens commencèrent à le tripoter, regardèrent ses yeux, ses oreilles, son nez, sa bouche et trouvèrent qu’il ressemblait à un homme. La jeune fille, elle, le trouva à son goût.
Elle dit à son père : « Papa, j’aime voir cet homme, emmenons le avec nous. » Le père répondit : « Tu ne sais pas d’où il vient et tu veux l’emmener au village ? »
– Oui, répondit-elle, nous le mettrons dans le grand carbet. L’homme blanc aussi trouvait la jeune fille amérindienne attirante. Au début, les jeunes gens ne se comprenaient pas car ils ne parlaient pas la même langue mais l’amour n’a pas besoin de paroles, ils communiquaient par signes et leurs yeux exprimaient ce qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre. Lui s’appelait André et elle, Wana.Quelques mois plus tard, Wana donna naissance à un magnifique enfant comme le sont tous les enfants de l’amour. André et Wana étaient heureux. Mais brutalement, le jeune homme tomba gravement malade. La fièvre envahit son corps. Au village, le Chaman lui donna tous les remèdes qu’il connaissait, sans résultat. De jour en jour, André allait de plus en plus mal. Alors, tout le village se réunit sous le grand carbet afin de trouver une solution : « Que pouvons-nous faire ? » dit le père de Wana. –Il faut qu’il retourne chez lui, dit le chef du village, sinon il va mourir.
Wana était désespérée. André lui dit : « Il faut que je parte, Wana, ne me laisse pas partir seul, viens avec moi. »
Mais Wana ne voulait pas abandonner sa famille, ni son village et elle ne voulait pas non plus qu’André parte. Elle sentit son cœur se briser. La maman de Wana était triste pour sa fille.
Elle l’appela et lui dit : « Je sais ce qu’il faut faire, va ramasser des awaras et rapporte-moi de l’abattis les légumes que tu trouveras. La maman fit cuire pendant trois jours et trois nuits le jus d’awara auquel elle ajouta toutes les viandes et poissons qu’elle trouva chez elle et les légumes rapportés par sa fille. André mangea son bouillon d’awara avec son couac et il trouva cela délicieux. Puis le jour du départ arriva.
Les amérindiens mirent André dans un canot avec des provisions et lui dire de descendre les rivières et les fleuves jusqu’à la mer. En chemin, il rencontrerait des personnes qui pourraient l’aider à rentrer dans son pays. Les jours puis les semaines puis les mois passèrent.
Dans son cœur, Wana ne pouvait pas croire qu’André ne reviendrait plus. Elle voyait son visage tous les jours dans celui de leur enfant. L’amour et l’espoir la faisaient parcourir toutes les nuits la forêt à sa recherche. En France, André ne parvenait pas à oublier Wana et son enfant.
Au bout de quelques temps, il fut guéri mais son cœur était malade, sa femme et son petit lui manquaient trop, il ne parvenait pas à vivre sans eux. Il devait revenir en Guyane.
Une année à peine après son retour en France, il reprit l’avion pour Cayenne. Il chercha un canot et refit le même chemin qui l’avait conduit à Wana. Mais la forêt est grande et tous les arbres se ressemblent. Il marcha longtemps, il ne trouvait pas le village de Wana.
Quand le soir tombait, il allumait un feu pour se réchauffer et cuire sa nourriture. Comme toutes les nuits, Wana cherchait André. Elle vit au loin la lueur d’un feu. L’espoir fit battre son cœur. Elle se mit à courir dans la direction de cette lumière en criant « André, André, c’est toi ? »
Quand André entendit son nom, il se leva, couru dans la direction de la voix en criant : « Wana, Wana … » Ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre… « Je ne parvenais pas à vivre sans toi, Wana, et je n’ai jamais oublié le bon bouillon d’awara que ta mère avait fait pour moi. »
André partit avec sa femme et son enfant fonder un nouveau village sur l’Oyapock. Sur le chemin, Wana n’arrêtait pas de rire tant elle était heureuse. Depuis, ce village s’appelle Wanari.
Et c’est pour cela que la légende dit : « Si tu manges du bouillon d’awara, en Guyane tu reviendras. » (Adaptation en français de Raymonde PROBST de « Sigré bounyon wara » de S. Francius et A. Chanol).
Bon appétit à tous et à l’année prochaine !!
– Fier d’être Guyanais et vous ?!
Ecrit par : Anjie Say